Pas de doute, «il incarne». Saisis de macronite aigüe, les commentateurs sont quasi unanimes à louer la prestation du nouveau président français sur la scène internationale. Les analystes de politique étrangère ont désormais les yeux de Chimène pour ce jeune paladin du centrisme «dont la valeur n’attend pas le nombre des années». C’est un fait que
le bleu-bite des sommets a tenu son rôle et qu’il a même résisté avec un courage digne de John Wayne à la poignée de main broyeuse de Donald Trump. Le mélange de fermeté et de coolitude juvénile qu’il affiche plaît manifestement à l’opinion et aux spécialistes.
On oublie néanmoins de préciser, la plupart du temps, que ces sommets du G7 sont réglés au quart de millimètre par le protocole et les conseillers en communication des Grands. Il suffit de suivre le guide pour rester dans les clous. Il faut y mettre une bonne volonté certaine pour succomber à la gaffe. Même Donald Trump paraît compétent dans ces saynètes bien agencées. Il est vrai qu’il débite tant d’énormités à la minute qu’une banalité qui sort de sa bouche se change en événement considérable.
Les G7 (ou G8, ou G9, ou G20) ont été inventés par Valéry Giscard d’Estaing, une sorte de Macron chauve (en son temps). Ils correspondent à l’idéal du gouvernement rationnel et de la coopération internationale consensuelle. Ils sont très utiles pour faciliter les rapports personnels entre responsables suprêmes. Pour le reste, à l’heure des communications instantanées, ils s’inscrivent en fait dans un cycle permanent de consultations qui se déploie tout au long de l’année. Rien à voir avec les grandes conférences d’antan – Berlin, Rapallo, Yalta ou Genève – qui réglaient, plus ou moins bien, les problèmes brûlants de l’heure. Les G7 débouchent sur un communiqué final écrit en langue de bois diplomatique qui noie les différends dans une sorte de novlangue caoutchouteuse. On pouvait attendre du sommet qu’il infléchisse les positions protectionnistes et
anti-écologiques de Donald Trump.
De ce point de vue, même si Macron affiche son optimisme, c’est un échec. Angela Merkel, sans langue de bois cette fois, en a en revanche tiré une conclusion importante pour la politique européenne : il ne faut plus attendre grand-chose, a-t-elle dit, du partenaire américain, pas plus que l’ex-conjoint britannique. Un début d’autonomie diplomatique pour l’Union ?
Les G7 remplissent une autre fonction, dont on parle moins : ils mettent en scène le pouvoir. Dans une chorégraphie de la puissance, réglée comme un ballet, mi-solennelle, mi-informelle, ils permettent à chaque chef d’Etat de briller dans les journaux télévisés et de renforcer son image intérieure en réfléchissant la lumière projetée par les six autres. Une sorte de miroir valorisant que les sept participants se tendent réciproquement à l’usage de leur propre pays. Cette fois, la réussite est complète.
Et aussi
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Bernard Cazeneuve va porter plainte contre Jean-Luc Mélenchon. Il a raison. Le «Líder máximo» insoumis a carrément accusé l’ancien ministre de l’Intérieur de s’être «occupé de l’assassinat de Rémi Fraisse», le jeune homme tué lors d’un affrontement avec les policiers à Sivens (Tarn). L’assassinat suppose une volonté de tuer, avec préméditation. Comme si Cazeneuve avait ourdi la mort du manifestant. C’est une insulte grave, même si les services de police ont été mis en cause à cette occasion. Et si Cazeneuve était ce que dit Mélenchon, comment qualifier Nicolás Maduro, dont la police et les milices ont tué environ une personne par jour au cours des manifestations de l’opposition vénézuélienne ? Sur ce sujet, Mélenchon, chaviste proclamé, est moins disert.
• L’affaire Ferrand se complique quelque peu. Le Parisien a retrouvé l’avocat chargé à l’époque de la transaction. Tout serait blanc-bleu si la bénéficiaire du deal immobilier n’était pas la compagne du ministre. Maître Castel, dans son entretien, confesse avoir été «choqué» par l’opération. Mais il ne s’agit pas d’argent public, personne, apparemment, n’a été lésé et la justice a considéré qu’il n’y avait pas lieu de se saisir. Reste la question éthique (à cause d’un possible conflit d’intérêts), dont En marche a fait une marque de fabrique…
• Les couteaux sont tirés d’un bout à l’autre du paysage politique. Au PS notamment. Thierry Mandon, ancien ministre, demande le départ de Jean-Christophe Cambadélis, qui pourrait être remplacé à la tête du PS, selon lui, par une direction collégiale représentant une nouvelle génération. Cambadélis a répondu vertement et annoncé des propositions de refondation du parti pour le 18 juin. Sera-t-il déjà à Londres ?
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